GINGA TETSUDÔ 999
ANALYSE DE L'OEUVRE
De l'importance des manteaux...


"Endosser le rôle de l'adulte"... Cela évoque aussi forcément l'importance des manteaux, de leur symbolique, de leur fonction. Ainsi, par exemple, le manteau de Tetsurô ; au tout début de la série, le garçon est affublé du manteau à capuche qu'il portait quand il vivait avec sa mère... Puis, dès son passage sur Titan et la rencontre de celle qui est en fait la mère de Tôchiro Ôyama, l'enfant porte alors les attributs vestimentaires (et l'arme) de celui qui lui est seulement décrit comme "un grand guerrier". On parlait de rite initiatique, mais l'acquisition de cette nouvelle tenue, qu'il ne quittera pas très souvent désormais, est aussi un acte fondateur, survenant après les difficiles événements de Mars et Titan, par lesquels Tetsurô, le petit garçon, est devenu Tetsurô le guerrier, qui a pris son destin en main.

Mais le manteau, en même temps, n'est-il pas aussi une façon de revêtir par un attribut extérieur l'identité de l'adulte tout en préservant au-dedans l'enfant qui est encore en lui ? Cette tenue, il l'a en quelque sorte "héritée" de Tôchiro Ôyama, figure de père spirituel qu'il n'a pas connu mais dont il fait revivre à son insu la mémoire pour ceux qui l'ont cotoyé ; et s'il y a bien un personnage qui cachait sous son manteau et ses allures de samourai le jardin secret de l'enfance, c'était bien Tôchiro, mort pour que vive le rêve de toute sa vie.

Percé de nombreux trous témoignant de combats de Tôchiro, le manteau est pour les autres le signe qu'ils ont en face d'eux un être prêt à tout ; pour le garçon, c'est une manière d'endosser à chaque fois qu'il le met son identité de combattant, tandis qu'il redevient en présence de Maetel le jeune garçon qui a besoin d'être protégé, rassuré. Lorsqu'il affronte le monde des adultes, le manteau dissimule l'enfant qu'il est encore et lui donne de l'assurance ; avec Maetel, Tetsurô ose se défaire du manteau car il se sait en confiance, protégé.

Le manteau de fourrure noir de Maetel, quant à lui, ne la quitte presque jamais (tout comme son chapeau là aussi) ; il aide à la rendre plus inaccessible (donc mystérieuse) ; elle ne l'enlève qu'en présence de Tetsurô, dans ces rares moments où elle s'autorise à être elle-même, le temps d'un bain ou d'une douche, comme si le manteau était lié tout entier à sa mission (on sait bien entendu aujourd'hui que le manteau noir est d'abord un signe de deuil, celui qu'elle a fait lorsque sa mère est devenue maléfique).

Qu'elle le fasse sciemment ou non, le manteau de Maetel est donc aussi pour le jeune garçon un révélateur de la sexualité féminine, dont il ne connaît rien mais qui s'ouvre à lui, par ce manteau, comme un trésor bien dissimulé... Et s'il n'est jamais épris de la moindre jeune fille (les filles, c'est bête, tous les pré-ados vous le diront !), Maetel est sans conteste pour lui l'image même de la femme idéale.

Et que dire du manteau du Contrôleur, dont le col remonte assez pour dissimuler son visage dans une ombre permanente ? N'est-il pas lui aussi une manière de dissimuler quelque chose, ou de se mentir à soi-même ? Chaque fois qu'il endosse l'uniforme règlementaire (et Dieu sait qu'il est à cheval sur le règlement !) ne fait-il pas disparaître l'être qui vit au-dedans ? Et puisqu'il est presque toujours en service, n'est-ce pas là une façon de ne pas trop se retrouver face à lui-même et à ses questions sans réponses ? Certes, l'uniforme dissimule aux autres son corps invisible, conséquence de son indécision à choisir entre l'état d'homme de chair et celui d'homme-robot... mais l'endosser et vivre à ce point pour son travail est aussi une façon pour lui de ne pas avoir à se poser trop souvent la question...


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Ginga Tetsudô 999 © 1977-81 Leiji Matsumoto / Tôei Animation
Ce dossier exclusif © 2003 Stéphane Beaumort / BIS Productions
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